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Comment le MACF va-t-il impacter les retailers et producteurs français ? 

Le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF), ou Carbon Border Adjustment Mechanism (CBAM), est une initiative de l’Union Européenne, entrée en vigueur le 1ᵉʳ octobre 2023. Son objectif ? Réduire les émissions de carbone en imposant une taxe sur les produits importés, afin de lutter contre les « fuites de carbone » dues aux délocalisations vers des pays aux réglementations environnementales moins strictes.

Mais concrètement, quel impact aura-t-il sur les retailers et producteurs français ?  

Une hausse des coûts qui va bouleverser la compétitivité

L’un des impacts immédiats du MACF est l’augmentation des coûts. Les produits importés soumis à la taxe carbone (83 €/tonne en 2024) à partir de 2026 deviendront plus chers, ce qui peut réduire les marges bénéficiaires ou entraîner une hausse des prix pour les consommateurs. Nous estimons que cette augmentation pourrait réduire le pouvoir d’achat des ménages européens de 0,5 à 1 % en moyenne. 

Source : BSI economics

Exemples d’augmentation des prix des produits importés : 

  • Produits métallurgiques : +10 à 20 % (acier, aluminiums fortement émetteurs de carbone) 
  • Engrais azotés : +15 à 25 % avec un impact significatif sur la production alimentaire 
  • Ciment : +5 à 15 % 
  • Produits électroniques : +5 à 10 % 
  • Vêtements : +3 à 7 % 
  • Aliments : +2 à 5 % (fruits et légumes hors saison) 

 

Ces hausses vont mettre les retailers français à l’épreuve. Mais elles ouvrent également des pistes de réflexion pour s’adapter. 

S’adapter : la clé du succès

Le MACF a pour objectif d’encourager des pratiques plus durables et de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour se conformer à cette nouvelle réglementation, les retailers français devront revoir en profondeur leurs chaînes d’approvisionnement et comprendre avec précision où, comment et avec quels matériaux les produits qu’ils vendent sont fabriqués.  

Cette mise en conformité impliquera probablement une charge administrative significative, ainsi que des investissements dans des systèmes de suivi et de reporting des émissions de carbone. 

À partir de 2026, le mécanisme sera pleinement opérationnel. Alors, comment les entreprises peuvent-elles se préparer pour garantir une mise en œuvre réussie ? 

1 - Optimiser sa chaîne d'approvisionnement

Réévaluation des fournisseurs : travailler avec des fournisseurs ayant une empreinte carbone plus faible peut aider à réduire ses couts. Renforcer les audits, intégrer la performance carbone dans les critères de sélection d’un fournisseur sont autant de nouveaux éléments à intégrer dans sa stratégie fournisseur. 

Localisation des sources : privilégier les fournisseurs locaux pour réduire les émissions de transport et bénéficier d’un avantage concurrentiel. 

2 - Investir dans les technologies vertes

Énergies renouvelables : utiliser des sources d’énergie renouvelable pour les opérations sur l’ensemble de la chaine logistique, accompagner ses fournisseurs dans leur transition écologique. 

Efficacité énergétique : améliorer l’efficacité énergétique des installations et des équipements pour réduire les émissions. 

3 - Optimiser la data produit

Systèmes de suivi des émissions : mettre en place des systèmes pour suivre et rapporter les émissions de carbone de manière précise et conforme aux exigences du MACF en lien avec l’ensemble des flux importés comme keewe.eu ou climease.com.  

Affiner sa data produit : matériaux, méthode de fabrication, énergie utilisée à l’extraction des primaires, sur la chaine de fabrication et même lors des différentes manutentions ou transports sont autant d’éléments à collecter pour mieux calculer le bilan de ces produits. 

4 - Renforcer la formation et la sensibilisation RSE

Formation du personnel : investir dans des programmes de formation pour éduquer les employés sur les spécificités du MACF et les meilleures pratiques pour réduire les émissions. Les métiers d’acheteur, de chef de produits et responsable de gamme vont de fait évoluer et se complexifier. 

Communication interne : assurer une communication claire et régulière sur les objectifs et les progrès en matière de durabilité. 

5 - Renforcer la collaboration et l’innovation

Partenariats stratégiques : accompagner la transition énergétique et la recherche et développement avec les fournisseurs clefs afin d’optimiser le bilan carbone des produits. 

Innovation produit : développer et promouvoir des produits durables qui répondent aux attentes des consommateurs en matière de responsabilité environnementale 

6 - Adapter ses prix et son offre.

Répercussion des coûts : intégrer dans la chaine de calcul et le prix de revient des articles le cout du MACF de manière transparente tout en communiquant clairement les raisons aux consommateurs. 

Diversification de l’offre : proposer une gamme de produits durables et à faible empreinte carbone pour attirer les consommateurs soucieux de l’environnement. 

MACF : une opportunité pour les retailers

Si le MACF représente un défi pour les retailers et producteurs français, il constitue également une opportunité unique. Ceux qui s’y préparent dès maintenant pourront non seulement se conformer aux nouvelles réglementations, mais aussi tirer profit des avantages concurrentiels liés à une production plus durable. 

Les produits locaux, notamment, pourraient se voir renforcer face aux importations à forte empreinte carbone, ce qui offrirait un atout précieux pour les entreprises européennes. 

Une transition complexe, mais bénéfique à long terme

Le MACF est un mécanisme complexe, mais il s’inscrit dans une dynamique de transition écologique bénéfique à long terme. Les entreprises devront probablement s’appuyer sur des experts pour naviguer dans les aspects techniques et légaux du mécanisme. Cela permettra non seulement de se conformer aux exigences, mais aussi de maximiser les gains liés à cette évolution. 

En prenant le MACF comme une véritable opportunité stratégique, les retailers et producteurs français pourront non seulement renforcer leur position sur le marché, mais aussi devenir des acteurs clés de la transition écologique en Europe. 

Par Laurent Puskarczyk